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1 · Héritage et numérisation

1,2 · Numérisation


Pour être manipulée par l'ordinateur, une information doit se trouver sous forme numérique, seul état de données exploitable informatiquement. Or jusqu'à son intégration dans la chaîne informatique, une information issue du réel et captée par un appareil électronique, est portée par un signal analogique : analogue au phénomène réel capté, mimétique de ses variations. Ce phénomène réel, c'est par exemple la longueur d'onde de la lumière captée par une photodiode de capteur photo-numérique, autrement dit une couleur. Le signal analogique directement produit par l'une de ces photodiodes est inexploitable par l'ordinateur (nota bene : plus de détails sur le capteur et ses photodiodes dans le chapitre suivant).
Pour en faire un objet manipulable par l'outil informatique, il faut le numériser. Cette ‘conversion en nombres’ s'appelle encodage binaire : il s'agit d'une traduction dans un langage à l'alphabet extrêmement restreint. On parle de représentation binaire, ou langage binaire.
Celui-ci possède 2 caractères, notés 1 et 0, ou vrai et faux, selon l'usage canonique. Ses mots les plus courts sont ainsi composés de l'un seul de ces 2 caractères, et se nomment bit (binary element). Chaque bit peut faire partie d'un ensemble de très nombreux bits et ainsi participer au codage de données beaucoup plus complexes que 1 ou 0. Comme par exemple les très fines variations de couleur susceptibles d'avoir été captées par les cellules d'un capteur photo-numérique.

42 = 101010
Justement, prenons l'une seule de ces photodiodes (elles sont des millions à la surface du capteur photo-numérique). Imaginons qu'elle est spécialisée dans la réception de rayons lumineux de couleur rouge. Admettons que la force de sa réaction est proportionnelle à la quantité de rouge qu'elle reçoit en un instant, et que celle-ci est transduite en nombres de 0 à 63, écrits selon le fameux code binaire. Comment s'écrit alors par exemple un rouge de 42 ? 101010. Ou encore vrai-faux-vrai-faux-vrai-faux. Naturellement le code binaire en électronique ne s'incarne pas par de petits nombres qui courent sur les cartes électroniques, mais plutôt par une politique du "plein ou vide d'électrons" dans les différentes cases du circuit. En voici une métaphore réalisée à l'aide d'une boîte de 6 oeufs (6 bits) :

42 en représentation binaire ovoïde

42 n'est bien sûr pas le seul nombre concerné :
on peut compter, avec une boîte de 6 oeufs, de 0 à 63 (voir l'animation Omelette numérique dans la boîte à médias).


Il n'existe pas dans ce langage de valeurs intermédiaires : soit la case est remplie, soit elle est vide. La lecture de l'information, aussi finement nuancée puisse-t-elle être, est ainsi indépendante des propriétés physiques de la matière utilisée pour la stocker, que ce soit brièvement ou à plus long terme. Elle est protégée par la politique du ‘tout ou rien’ de l'encodage binaire. C'est là l'avantage décisif en terme de perennité et fidélité à une information, vis-à-vis du signal analogique (matière vinylique du 45 tours, bande magnétique, papier argenté,...).

harmonie technologique ?
Les sauvegardes numériques sont ainsi des listes de 0 et 1, au goût et à l'odeur parfaitement neutres : on parle plutôt de stockage de données que de supports vinyls, bandes, cartons, papiers... Il suffit d'ouvrir par exemple un fichier image à l'aide d'un logiciel type “Notepad” ou “textEdit” pour s'en rendre compte (on obtient alors son code ASCII, plus compact que le binaire, que l'on peut par la suite traduire en binaire grâce à un petit convertisseur ASCII-binaire facilement trouvable sur internet : les résultats de la lecture d'une image au format JPEG selon les langages ASCII et binaire sont disponibles dans la boîte blanche ci-contre). Cette nature numérique permet la transversalité des traitements de ces mêmes informations, et ainsi la convergence des supports médiatiques. Convergence dont les louanges sont aujourd'hui largement chantées pour des motivations essentiellement techniques, mais qui a aussi été soulignée à un niveau plus profond, par exemple par Popper :
« Étant [numérique], l'image entretient avec d'autres manifestations esthétiques, tels le son et la musique, mais aussi avec le langage, une relation immédiate nouvelle. » L'art à l'âge électronique, F. Popper.
Une immédiateté dans la manipulation, une évidence dans les formats et les opérations possibles sur ces « manifestations esthétiques » qui mènent certains jusqu'à promouvoir l'idée qu'une harmonie technologique du monde a été trouvée.

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